L'esprit s’embrume et l'alcool se distille dans ses veines, lui arrachant le contrôle si précieux à son cœur. Elle s'abîme se heurte à ses propres démons, dans le confort de son appartement miteux, la créature s'octroie une parenthèse. Elle lève son elixir pour le porter à ses lèvres, faire rouler le liquide contre sa langue, glisser dans son gosier pour venir lui brûler les entrailles et inhibé ses sens. Perchée sur l'appuie de fenêtre dans une robe bien trop élégante pour une soirée de solitude. La robe est vaporeuse et aérienne, la mousseline garnie de diamant, les tissus enveloppe son corps, recouvre ses courbes, secondes peau parée de ses seules richesses. Blessé dans son orgueil, la miséreuse sent encore les iris royales la jaugée, la jugée, du haut de son piédestal, elle faisait et défaisait les réputation au grès de ses envies. Elle s'envoyait une nouvelle rasade, buvant au goulot de la bouteille de mousseux sans se soucier de la bienséance qui aurait voulu la voir boire dans un verre de cristal... Mais elle les avait tous revendu, pour se foutre quelques choses sous la dent. Alors qu'est-ce qu'elle en avait bien à faire de la philanthropie de cette reine. Maudite tête couronnée, elle était désireuse de la voir s’effondrer et de lui arracher la couronne ensanglantée. L’esprit s'embrume, rongée par l'âme meurtrie que la splendide ne s'est jamais autorisé à montrer à qui que ce soit, mais la brèche est ouverte, pour un temps, pour un soir seulement. Parce qu'elle crève, asphyxiée par la pression qu'elle s'impose, étouffée par l'ambition de s'élever, elle se tord de douleur, le cœur empoisonné par l'amour qu'elle voue au monstrueux. Et le voilà qui s'infiltre en elle, perverti chaque parcelle de son corps, s’appropriant son âme pour devenir une obsession, une idée implantée dont elle ne peut plus se défaire. Il est là, il est partout, chaque détail de son existence le ramène à lui. Dans un soupire elle descend de son perchoir, se traîne, tourne sur elle même, l'une de ses mains accrochées à ses tempes alors que son autre main tient toujours la bouteille. Ballet d'un astre brisé qui vient à vriller, retenu par une main chevaleresque qu'elle n'attendait pas. Elle s'y accroche pourtant, relevant son regard sur cette présence qui lui était imposée. Helios. Le rire fuse entre les lèvres de l'enfant terrible. You. Again. You. Always. Beautés écorchée, avait-elle seulement déjà été aussi belle, dans la fragilité de son être, exposée et vulnérable? Elle lève la bouteille en sa direction, pour trinquer à eux, à lui, à tout ce qu'ils ne pouvaient être.